Le Barde réapparut dans une forêt, toujours dans la même pose. Sauf que cette fois, il avait un chapeau noir à bords court. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas mis ce chapeau, et il lui avait manqué. Avec un sourire, Le Barde grimpa dans un arbre. Il sauta sur un arbre voisin en sifflotant un air étrange. A un moment il se mit à chanter doucement, sans troubler la tranquilité des bois.

"I won the gym badge, but you won my heart! ♫"

Il s'assit sur une branche haute et regarda la forêt. Elle était très dense et magnifique. Il y régnait une superbe harmonie. Dans les couleurs, les textures... Ce lac allait parfaitement avec ces pierres, ces pierres allaient parfaitement avec cette herbe, cette herbe allait parfaitement avec cette femme, cette femme allait parfaitement avec cet arbre, cet arbre allait parfaitement avec- Une femme?

Le Barde reporta son attention sur elle et s'en approcha sans faire de bruit. Elle avait les yeux fermés, et semblait inconsciente. Le Barde sonda un instant le monde du Rêve et vit qu'elle ne dormait pas, mais qu'elle était seulement inconsciente. Alors il s'assit à trois mètres d'elle, sortit son luth et commença à jouer, attendant que la femme se réveille.

Cela faisait plusieurs heures qu'Aeliria était dans cette forêt. Elle n'était pas perdue loin de là, on pourrait plutôt dire qu'elle savourait la tranquillité de l'endroit et surtout sa beauté. Rivières, arbres, herbe, lacs, tout cela s'entremêlait dans un mélange hétéroclite de choses sans pour autant détruire l'homogénéité du lieu et c'est en quelque sorte cela qui en faisait la beauté de l'endroit. Un lieu varié mais non déroutant. Quelques animaux pouvaient être observés. Aeliria porta justement son attention sur un bien beau colibri qui virevoltait devant elle. Cette nature là était belle, pure. Ce qu'elle avait toujours voulu. Pourquoi l'homme ne pouvait-il pas prendre exemple sur ce qui l'entoure et devenir meilleur ? Elle connaissait en quelque sorte la réponse, étant devenue elle-même une tueuse. Un cercle vicieux était en place et elle était tombée dedans.

Mais ce lieu lui plaisait, elle y oubliait tout, jusqu'à l'existence même de la civilisation. Du moins, c'était avant qu'elle entende un sifflement dans les arbres. Pas un sifflement qu'il est possible d'entendre en ces lieux. Ce sifflement était de nature humaine, ceci était certain. Femme ou homme, elle ne pouvait le dire mais quelqu'un était là-haut et elle ignorait ses intentions. Elle recula prudemment, scrutant les cieux couverts par cette verdure dans l'espoir de voir l'individu. Elle ne vit cependant pas la descente située derrière elle. Son pied bascula dans le vide. Elle essaya de se rattraper sur ce qui se trouvait à portée de main, en d'autres mots, rien du tout. Elle tomba donc à la renverse et déboula sur les quelques mètres de la descente mais elle perdit conscience à mi-parcours, sa tête ayant heurté un peu trop fort le sol. La chute se termina, laissant la son corps inconscient et esseulé, sa respiration diminuant lentement.



Le noir était présent, l'entourant totalement, elle ne sentait plus rien, juste l'oppression de ne plus être elle. Le premier sens qui lui revint fut l’ouïe, suivie de peu par l'odorat. Elle distingua en effet un léger son, très faible mais progressant peu à peu, un son d'instrument qui se jouait... Loin au début mais se rapprochant sans pour autant se déplacer. Une légère odeur d'herbe vint lui chatouiller délicatement les narines et aiguisa un peu plus ses sens. Sa vue ne revenait pas, ses paupières étant très lourdes mais elle pu gesticuler légèrement et prononcer quelques murmures incompréhensibles excepté un seul mot qui pouvait s'entendre clairement si on avait tendu suffisamment l'oreille.

Eau...

Ses faibles membres, coupés pendant quelques instants seulement de leurs fonctions étaient néanmoins en train de supplier un apport hydratant pour qu'elle puisse enfin se relever. Néanmoins, une question restait présente plus que tout le reste. Y avait-il quelqu'un présent ?

Lorsqu'il l'entendit parler, le Barde s'approcha d'elle en posant son luth à terre pour essayer de comprendre ce qu'elle disait, et finit par comprendre, la troisième fois qu'Aeliria fit sa demande.

Il se releva d'un bond et ses ailes apparurent dans son dos. En quelques battements d'ailes, il fendit la forêt, cherchant de l'eau, zigzaguant entre les troncs. Dans sa main droite apparut une bulle ressemblant à une bulle de savon, qu'il jeta dans un lac. Il ramena ensuite sa main vers lui, et ramena ainsi la bulle qui avait largement grossi et contenait au minimum 5 litres d'eau. Il la prit alors entre ses deux mains avant de fendre la forêt en sens inverse. Il percuta un tronc et se démit l'épaule sans vraiment y faire attention, et roula sur le sol de la forêt. Alors que la bulle allait percuter le sol, le Barde força sur son épaule démise pour la rattraper.

Avec un hurlement, il eut l'impression qu'on lui arrachait le bras, mais il sauva la bulle. Tenant son épaule, il retourna vers Aeliria. Il remit la bulle en suspension dans l'air avant de faire apparaitre un gobelet irisé et le remplir d'eau de la bulle. Il remit son épaule avec un cri, puis souleva doucement le corps d'Aeliria et lui fit boire de l'eau, ravi de voir son visage reprendre des couleurs.

La jeune demoiselle retrouvait de plus en plus ses sens. Elle sentit bouger autour d'elle, la mélodie cessa pour laisser place à des mouvements, de l'herbe écrasée, des déplacements. Elle ne comprenait pas du tout ce qu'il se passait. Elle essayait tant bien que mal d'ouvrir ses yeux mais ceux-ci refusaient d'obéir. Le bruit cessa un instant, le calme revenait. Allait-elle restée en ce lieu, sans pouvoir bouger, encore longtemps ? Elle l'ignorait et le redouter. Un profond hurlement, bien que lointain, se fit entendre. La peur se saisit de son coeur pour la première fois depuis ce jour. Elle ne pouvait pas se défendre, elle supplia ses membres de bouger, de se relever, de l'aider mais rien ne se fit. Du bruit se fit à nouveau entendre. Quelqu'un approchait. Mais qui ? Quoi ? Qu'avait-elle à craindre ? L'être près d'elle poussa à nouveau un cri à glacer les os et elle essaya encore plus de s'enfuir, sans succès. Elle se sentit soulevée, incapable de se protéger. Elle se résignait à mourir lentement quand elle sentit de l'eau filer entre ses lèvres et réhydrater son gosier. La surprise fut aussi grande que sa difficulté à avaler le doux liquide salvateur. Une gorgée, puis deux... Le reste vint plus naturellement, la facilité revenait, elle sentait son corps bruler d'une folle envie de courir. Une fois rassasiée, elle ouvrit les yeux. Des yeux bleus profonds, de longs cheveux blonds, des... ailes ?! Mais ce qui fit le plus réagir la jeune fille fut le sourire. C'était CE sourire. Celui qu'elle ne voulait plus revoir.

Par réflexe elle se dégagea des bras de son sauveur et se mit en position de défense, sortant une fine dague de sa veste. Si cet être voulait s'approcher, il en subirait les conséquences. Cela ne se reproduirait pas, plus jamais elle ne vivrait ce cauchemar. Ses yeux s'animèrent d'une subtile flamme. Une envie de défendre sa vie jusqu'au bout et de ne pas être la seule à la perdre.

Qui... Qui es-tu ? Que fais-tu ici ?!

Elle reculait légèrement, faisant néanmoins attention à ne pas réitérer sa mésaventure. Un arbre vint la rassurer. Rien ne pouvait se passer, elle pouvait enfin se concentrer sur cette personne au sourire malicieux.

Le Barde recula quand Aeliria sortit sa dague. Non pas qu'il ait eu peur, non... Personne ne maniait mieux le couteau que lui... Mais il pouvait admettre avoir troublé la jeune femme. Et cela n'était pas ce qu'il voulait. Avec un sourire, il leva les mains, et s'aperçut qu'il n'aurait pas du sourire, et que c'était ça qui rendait la fille aussi nerveuse en la voyant tressaillir. Malgré lui, cela le fit sourire encore plus pendant qu'il prenait la parole pour répondre à la femme, sans rebaisser les bras.

"Tout d'abord, je suis aussi enchanté de te rencontrer! Je suis Le Barde Errant, un genre d'aventurier, la barbe de trois jours en moins, un luth en plus! Quant à ce que je fais ici... Eh bien primairement, je me balade... Parce que je trouve cet endroit simplement beau... Et secondement, je te sauve la vie, ce qui, je crois, est un peu plus important que la manière dont je le fais... Et toi, jeune femme, quel est ton nom? Enfin, si ça ne te dérange pas de me le dire... Si tu veux, je peux aussi disparaitre, mais crois moi, je ne te veux pas de mal..."

Aeliria a quitté le forum, tu peux partir du topic.